Alors que les dirigeants de la planète se réunissent pour la « Journée sur l'énergie » lors de la COP27 (mardi 15 novembre), un nouveau rapport expose la menace que fait peser l'expansion des combustibles fossiles sur les forêts tropicales africaines, essentielles pour le climat, et soulève des doutes quant à la manière dont cette expansion répondra aux besoins énergétiques de la région. Le Congo dans la ligne de mire, une nouvelle analyse des blocs pétroliers et gaziers en Afrique et dans le bassin du Congo, montre clairement les dangers croissants que représente l'exploitation pétrolière et gazière pour les écosystèmes vitaux en Afrique. Voici les conclusions du rapport :
- La superficie des terres allouées à la production de pétrole et de gaz sur le continent africain pourrait quadrupler.
- Les blocs d'exploration pétrolière et gazière recouvrent 30 % des forêts tropicales denses d'Afrique, dont 90 % se trouvent dans le bassin du Congo.
- Dans cette région, 64 millions d'hectares coïncident aujourd'hui avec des blocs pétroliers et gaziers (l'équivalent de près de deux fois la taille de l'Allemagne).
- Plus de 150 groupes ethniques distincts ont élu domicile dans le bassin du Congo et plus de 35 millions de personnes (soit 20 % des zones habitées de la région) se trouvent actuellement dans des blocs pétroliers et gaziers.
Il est bien sûr évident qu'aucune nouvelle exploitation de combustibles fossiles ne peut avoir lieu où que ce soit si le monde veut éviter de dépasser les objectifs climatiques convenus à l'échelle internationale ; mais cette expansion amène également à s'interroger sur la manière dont le projet répondra aux besoins énergétiques d'un continent qui abrite 90 % de la population privée d'électricité sur la planète, car peu d'informations ont été fournies à ce sujet.
Selon Joe Eisen, directeur exécutif de la Rainforest Foundation UK, « le risque est que cette ruée vers le pétrole dans les forêts d'Afrique profite aux entreprises étrangères, aux marchés d'exportation et aux politiciens plutôt qu'aux communautés rurales. De plus, le temps qu'il faudra pour construire l'infrastructure nécessaire à l'extraction du pétrole de ces zones éloignées et sensibles pourrait rendre ces ressources inexploitables alors que le monde est en train de passer aux énergies renouvelables. L'Afrique possède un potentiel abondant dans ce domaine, mais ne reçoit actuellement que 2 % des investissements à l'échelle mondiale. Il faut que cela change. »
Ce rapport présente des solutions visant à pousser les économies du G20 à accepter leur responsabilité historique dans le changement climatique en s'engageant de plusieurs manières : l'annulation de la dette, l'augmentation des ressources financières qui permettront de créer les conditions nécessaires pour maintenir les combustibles fossiles dans le sol et les arbres debout, et la promotion des droits des peuples autochtones et des autres communautés locales.
Francois Biloko, Secrétaire général du Réseau CREF, un réseau environnemental de premier plan dans le bassin du Congo, a dressé un constat de la réalité lors la COP27 :
« Nous ne devons pas laisser une expansion chaotique des combustibles fossiles mettre en danger nos précieuses forêts tropicales, les zones sensibles en matière de biodiversité ainsi que les droits et les moyens de subsistance des communautés forestières qui ressentent déjà les effets du changement climatique. En nous concentrant sur la réalisation de notre potentiel en matière d'énergies renouvelables, l'Afrique et les pays du bassin du Congo peuvent ouvrir la voie à un avenir vert et prospère, a-t-il déclaré.
« Ce dont le monde a besoin aujourd'hui, ce sont de solutions du 21e siècle qui donnent la priorité aux peuples, à la nature et à la stabilité du climat. Les écosystèmes vitaux comme les bassins du Congo et de l'Amazone, ainsi que d'autres régions, doivent être une priorité en matière de préservation, au même titre que l'expansion des droits et des territoires des communautés autochtones et locales. », affirme Tyson Miller, directeur exécutif de Earth Insight.