Une vue sur l'état de dégradation du fleuve Sénégal
Depuis un demi-siècle, les populations de la vallée du fleuve Sénégal assistent, presque impuissantes et résignées, au spectacle insoutenable d’entrée en agonie de leurs différents cours d’eau, source de leurs activités socio-économiques et culturelles.
Sous les effets combinés des changements climatiques, des aménagements hydro-agricoles et des activités industrielles dans la région, le fleuve Sénégal et les écosystèmes qui en dépendent ont enregistré une perte considérable de vitalité. Ils se meurent de manière lente, progressive et évidente mais dans une indifférence quasi générale.
Les couvertures végétales situées le long et entre les cours d’eau ainsi que les réserves forestières classées ont été certes durement éprouvées par les cycles de sécheresses des années 1970 et 1980, mais elles ont été surtout décimées, à près de 80 pour cent, par les activités humaines (production de charbon de bois et aménagements agricoles, notamment).
Le déficit et /ou l’irrégularité pluviométriques dans la même période au niveau de la région et la réalisation, à coût de milliards de francs CFA, des barrages de Diama et de Manantali ont entraîné une dégradation notable du régime du fleuve Sénégal (réduction du lit du fleuve et de son débit).
Le Sénégal a perdu aujourd’hui, de sa majesté d’antan, il se confond même, par endroit, à son affluent, le Doué. La faiblesse de son débit, surtout pendant la période sèche, altère la composition et la qualité des eaux du fleuve : la teneur en oxygène de ses eaux a fortement chuté à cause de la baisse considérable du courant fluvial.
Autre facteur responsable de la décomposition avancée des eaux du fleuve Sénégal : les centaines de milliers de tonnes de déchets chimiques de toute sorte (engrais, herbicides, insecticides) provenant des exploitations agricoles et des unités industrielles y sont drainés au quotidien.
Les énormes quantités de déchets plastiques produits aux niveaux des marchés hebdomadaires et des ménages de la région se retrouvent également, au gré des vents, au fond des rivières et devenant ainsi avant et après leur désintégration des pièges mortels pour le poisson.
La réduction drastique de la diversité et des réserves poissonnières de la région est consécutive à la baisse notable de nutriments dans les eaux des rivières, à la faiblesse de l’apport nutritif des écosystèmes environnants (moins de fleurs et d’insectes) et à la destruction massive et rapide des sites de reproduction des espèces fluviales.
Ce désastre écologique sans précédent dans l’histoire de la région constitue la principale cause de la crise socio-économique sévissant dans la vallée : chômage, drogue et exode massif des jeunes vers les centres urbains sont en effet étroitement liés aux difficultés des secteurs de l’agriculture, de la pêche et de l’élevage.
Les altérations physique et chimique des eaux fluviales de la vallée, la décomposition avancée de ses eaux, ont provoqué de profondes mutations écosystémiques : l’espace fluvial est aujourd’hui colonisé par de nouvelles espèces végétales (typha, algues notamment) et par des parasites responsables de maladies tant au niveau des populations qu’à celui du cheptel.
Aujourd’hui, les populations du Walo et du Fouta qui, il y a moins de trois décennies buvaient l’eau du fleuve sans traitement préalable, sans risque majeur de contracter des maladies, n’osent actuellement même plus y faire leurs ablutions de peur de se remplir le corps de parasites. Des villages entiers de la vallée souffrent de pathologies chroniques liées à l’eau. La bilharziose par exemple fait des ravages dans des localités comme Mbilor, Moundouwaye ou encore Guédé Chantier pour ne citer que ceux-là.
Les dégradations de l’état des eaux du fleuve Sénégal et de la qualité de vie des populations de la vallée s’accentueront encore avec l’assaut final que constitue la généralisation des exploitations rizicoles dans toute la région.
La vallée du fleuve Sénégal devrait être une zone agroforestière par excellence d’une part, pour prévenir le dessèchement progressif de la région, freiner l’érosion des sols et stopper ainsi l’avancée du désert et de l’autre pour assurer une production fruitière plus importante pour les marchés local, sous régional et international.
La mort progressive du fleuve Sénégal et de la vallée est la résultante des programmes de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (Omvs), des laboratoires agro-chimiques, des pollutions industrielles, des politiques agricoles irresponsables mises en œuvre de part et d’autres du fleuve, mais surtout du côté sénégalais. Les ministères de l’Environnement, de l’Agriculture et de la Santé du Sénégal ont une lourde responsabilité dans la crise écologique et socio-économique qui affecte les populations de la vallée.
En vue de mettre un terme au massacre des écosystèmes et de la biodiversité de la vallée et des autres régions de notre pays, il nous tarde de nous s’inspirer du modèle de développement des écovillages. Sekem (Egypte), Auroville (Inde), Salayel Loboddou (Mauritanie), Diarra (Sénégal) pour ne citer que ces quelques exemples ont montré la voie en domptant des portions de déserts pour y bâtir leurs bonheurs communautaires. En cela, ils constituent sans aucun doute des modèles intégrés, sûrs et fiables pour la sous-région et le reste du continent africain.
Dr. Ousmane Aly PAME
Président de la Section africaine du Réseau Mondial des Ecovillages
Sites: www. gen-africa.org / www.ecovillage.org
skype : oapame / twitter: oalypame/ Email: oalypame@gen-africa.org
Sous les effets combinés des changements climatiques, des aménagements hydro-agricoles et des activités industrielles dans la région, le fleuve Sénégal et les écosystèmes qui en dépendent ont enregistré une perte considérable de vitalité. Ils se meurent de manière lente, progressive et évidente mais dans une indifférence quasi générale.
Les couvertures végétales situées le long et entre les cours d’eau ainsi que les réserves forestières classées ont été certes durement éprouvées par les cycles de sécheresses des années 1970 et 1980, mais elles ont été surtout décimées, à près de 80 pour cent, par les activités humaines (production de charbon de bois et aménagements agricoles, notamment).
Le déficit et /ou l’irrégularité pluviométriques dans la même période au niveau de la région et la réalisation, à coût de milliards de francs CFA, des barrages de Diama et de Manantali ont entraîné une dégradation notable du régime du fleuve Sénégal (réduction du lit du fleuve et de son débit).
Le Sénégal a perdu aujourd’hui, de sa majesté d’antan, il se confond même, par endroit, à son affluent, le Doué. La faiblesse de son débit, surtout pendant la période sèche, altère la composition et la qualité des eaux du fleuve : la teneur en oxygène de ses eaux a fortement chuté à cause de la baisse considérable du courant fluvial.
Autre facteur responsable de la décomposition avancée des eaux du fleuve Sénégal : les centaines de milliers de tonnes de déchets chimiques de toute sorte (engrais, herbicides, insecticides) provenant des exploitations agricoles et des unités industrielles y sont drainés au quotidien.
Les énormes quantités de déchets plastiques produits aux niveaux des marchés hebdomadaires et des ménages de la région se retrouvent également, au gré des vents, au fond des rivières et devenant ainsi avant et après leur désintégration des pièges mortels pour le poisson.
La réduction drastique de la diversité et des réserves poissonnières de la région est consécutive à la baisse notable de nutriments dans les eaux des rivières, à la faiblesse de l’apport nutritif des écosystèmes environnants (moins de fleurs et d’insectes) et à la destruction massive et rapide des sites de reproduction des espèces fluviales.
Ce désastre écologique sans précédent dans l’histoire de la région constitue la principale cause de la crise socio-économique sévissant dans la vallée : chômage, drogue et exode massif des jeunes vers les centres urbains sont en effet étroitement liés aux difficultés des secteurs de l’agriculture, de la pêche et de l’élevage.
Les altérations physique et chimique des eaux fluviales de la vallée, la décomposition avancée de ses eaux, ont provoqué de profondes mutations écosystémiques : l’espace fluvial est aujourd’hui colonisé par de nouvelles espèces végétales (typha, algues notamment) et par des parasites responsables de maladies tant au niveau des populations qu’à celui du cheptel.
Aujourd’hui, les populations du Walo et du Fouta qui, il y a moins de trois décennies buvaient l’eau du fleuve sans traitement préalable, sans risque majeur de contracter des maladies, n’osent actuellement même plus y faire leurs ablutions de peur de se remplir le corps de parasites. Des villages entiers de la vallée souffrent de pathologies chroniques liées à l’eau. La bilharziose par exemple fait des ravages dans des localités comme Mbilor, Moundouwaye ou encore Guédé Chantier pour ne citer que ceux-là.
Les dégradations de l’état des eaux du fleuve Sénégal et de la qualité de vie des populations de la vallée s’accentueront encore avec l’assaut final que constitue la généralisation des exploitations rizicoles dans toute la région.
La vallée du fleuve Sénégal devrait être une zone agroforestière par excellence d’une part, pour prévenir le dessèchement progressif de la région, freiner l’érosion des sols et stopper ainsi l’avancée du désert et de l’autre pour assurer une production fruitière plus importante pour les marchés local, sous régional et international.
La mort progressive du fleuve Sénégal et de la vallée est la résultante des programmes de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (Omvs), des laboratoires agro-chimiques, des pollutions industrielles, des politiques agricoles irresponsables mises en œuvre de part et d’autres du fleuve, mais surtout du côté sénégalais. Les ministères de l’Environnement, de l’Agriculture et de la Santé du Sénégal ont une lourde responsabilité dans la crise écologique et socio-économique qui affecte les populations de la vallée.
En vue de mettre un terme au massacre des écosystèmes et de la biodiversité de la vallée et des autres régions de notre pays, il nous tarde de nous s’inspirer du modèle de développement des écovillages. Sekem (Egypte), Auroville (Inde), Salayel Loboddou (Mauritanie), Diarra (Sénégal) pour ne citer que ces quelques exemples ont montré la voie en domptant des portions de déserts pour y bâtir leurs bonheurs communautaires. En cela, ils constituent sans aucun doute des modèles intégrés, sûrs et fiables pour la sous-région et le reste du continent africain.
Dr. Ousmane Aly PAME
Président de la Section africaine du Réseau Mondial des Ecovillages
Sites: www. gen-africa.org / www.ecovillage.org
skype : oapame / twitter: oalypame/ Email: oalypame@gen-africa.org