Les villes secondaires ou petites villes (généralement entre 5 000 et 50 000 habitants) ne sont généralement pas desservies par les sociétés d’eaux publiques nationales. Même si dans le cadre de la décentralisation, les municipalités ont le pouvoir d'exploiter par elles-mêmes le service d'eau, elles manquent souvent de capitaux et de compétences techniques pour le faire. Souvent, les municipalités préfèrent améliorer les performances opérationnelles des sociétés d’eaux publiques régionales ou locales existantes ou renforcer la gestion communautaire. Dans d'autres cas, elles choisissent de recourir aux compétences techniques du secteur privé pour obtenir des services d'eau et d'assainissement plus efficaces, abordables et durables. Il n'y a donc pas de solution toute faite pour faire face aux nombreux défis liés à l’amélioration des services d’eau et d'assainissement dans les villes secondaires.
Le secteur public peut s’appuyer sur différents types de partenariats avec le secteur privé pour renforcer ses capacités d’intervention. Cependant, pour que le secteur privé puisse réaliser pleinement son potentiel à l'échelle dans l’alimentation en eau potable des villes secondaires, on constate que des institutions publiques fortes sont nécessaires pour susciter la demande, structurer et réguler le marché. Une nouvelle étude globale (pdf) qui vient d’être publiée par le Programme Eau et Assainissement de la Banque mondiale s’est intéressée à 7 pays (Colombie [pdf], Bangladesh, Philippines, Ouganda [pdf], Cambodge, Niger et Sénégal). Les enseignements tirés de cette étude suggèrent que les 3 principales actions ci-après peuvent aider les institutions publiques à mettre en place un environnement favorable au développement du secteur privé en vue de fournir de meilleurs services d’approvisionnement en eau potable (AEP) et d’assainissement dans les petites villes :
- Renforcer la participation citoyenne : impliquer la société civile et les autres parties prenantes dans un processus de dialogue bien conçu et doté de ressources propres est une étape cruciale en vue de sensibiliser les populations et les parties prenantes sur les enjeux de la participation du secteur privé. En 2005, au Bangladesh, l'absence de ce type d’actions préalables a été préjudiciable aux efforts du Gouvernement central visant à promouvoir la participation du secteur privé dans la gestion de l’eau dans les villes secondaires. En revanche, le Gouvernement des Philippines a créé en 2008 un Centre PPP, qui agit comme un guichet unique rassemblant toutes les connaissances sur les PPP. Le Centre PPP fournit divers programmes de renforcement des capacités aux institutions gouvernementales locales en termes de compréhension du concept de PPP, de structuration et de suivi-evaluation des projets de PPP.
- Encourager l’ouverture et la structuration du marché: L'ouverture du marché signifie que les gouvernements nationaux délèguent la responsabilité de fournir les services publics aux collectivités locales ou d’autres entités publiques qui, à leur tour, cherchent le soutien du secteur privé pour compléter leurs propres compétences. Au Sénégal, le Gouvernement a structuré le marché de l’AEP en milieu rural en créant une société nationale de patrimoine. L’Office des Forages Ruraux (OFOR) a regroupé les 1.500 mini-réseaux ruraux du pays en 5 zones de service PPP qui sont ensuite mis en concurrence en vue d’être gérées par des opérateurs privés. Depuis 2015, SEOH un opérateur privé fournit de l'eau potable à 400.000 personnes dans les zones de Notto Diosmone Palmarin et Gorom Lampsar.
- Mobiliser les ressources financières locales: Il s’agit d’élaborer des plans d'action visant les institutions financières locales pour les aider à mieux comprendre le secteur de l’eau et à offrir des produits financiers adaptés. Au Bénin (pdf), les banques commerciales locales se sont engagées à soutenir le secteur de l'eau en fournissant divers instruments de financement pour permettre aux opérateurs privés dans les petites villes d’étendre le service et de réaliser de nouveaux branchements d'eau. Aux Philippines, le type de PPP le plus pratiqué pour l’AEP dans les petites villes est le Joint-Venture (pdf) qui permet au privé d’apporter des capitaux propres ou des prêts.
Par Fadel Ndaw – Expert en Eau et Assainissement (Banque mondiale)